En cause, les propos contenus dans son livre Rwanda, la vérité sur l’opération Turquoise – Quand les archives parlent, paru en 2019, à la page 198 : « La thèse conspirationniste d’un régime hutu ayant planifié un “génocide” au Rwanda constitue l’une des plus grandes escroqueries du XXe siècle ». Charles Onana y affirme également, à la page 34, que « le conflit et les massacres du Rwanda n’ont rien à voir avec le génocide des Juifs ». Il renchérit à la page 460 : « Continuer à pérorer sur un hypothétique “plan de génocide” des Hutus ou une pseudo-opération de sauvetage des Tutsis par le FPR est une escroquerie, une imposture et une falsification de l’histoire.
Pour la Ligue des droits de l’Homme, la Fédération internationale pour les droits humains et Survie, ces propos constituent une opération de négation du génocide perpétré contre les Tutsis au Rwanda en 1994 et une contestation des crimes contre l’humanité. C’est ainsi qu’elles ont porté ensemble plainte contre l’auteur franco-camerounais, avant d’être rejointes les autres associations qui se sont portées partie civile.
« La lecture des ouvrages sur le Rwanda de Charles Onana, fils spirituel revendiqué de Pierre Péan, montre également ses affinités avec certains milieux militaires français et rwandais dont il se fait le porte-voix. Dans Rwanda, la vérité sur l’opération Turquoise, Onana recueille quatre témoignages d’officiers des Forces armées rwandaises (FAR), dont celui d’Anatole Nsengiyumva condamné en appel par le Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR), ainsi que celui d’André Ntagerura, ministre du gouvernement intérimaire rwandais (GIR), acquitté, lui, par le TPIR », écrit Ruben Morin de l’association Survie. Qui explique : « Nsengiyumva et Ntagerura ont participé à la publication en 1996 d’un texte dans lequel on peut lire que l’utilisation du mot “génocide” procède d’une campagne médiatique savamment conçue par le FPR et ses alliés » et que « le “génocide tutsi” au Rwanda était un alibi ou une carte utilisée pour la conquête finale du pouvoir, cautionnée par la Communauté Internationale ».
Haine virulente contre les Tutsi
Auteur de plusieurs livres sur le Congo et la région des Grands lacs, dont le dernier, ‘‘Holocauste au Congo’’, a connu un grand succès, soutenu visiblement par le pouvoir politique congolais – il a récemment été accueilli par une haie d’honneur de la police nationale comme un officiel à son arrivée à l’Université de Kinshasa pour une conférence – Charles Onana est devenu une sorte de héros pour une frange de Congolais. En France et Belgique, des membres de la diaspora congolaise se mobilisent pour lui apporter leur soutien lors du procès. « Ces accusations sont évidemment infondées et il serait donc bon que nous nous mobilisions pour défendre Onana qui mouille le maillot et investigue avec profondeur, courage et honnêteté sur le génocide Congolais depuis plus de 10 ans. Alors qu’il est Camerounais, il fait plus avancer la cause mieux que beaucoup de Congolais », peut-on lire dans un message largement diffusé sur les réseaux sociaux dans la diaspora congolaise de France.
En fait de faire avancer la cause congolaise, M. Onana prêche une haine virulente contre les Tutsi de l’est de la RDC, auxquels il dénie, au passage, leur nationalité congolaise. C’est ce qui lui vaut les acclamations d’une partie importante de congolais, dans un pays où la haine des Tutsi est une preuve de patriotisme pour certains. Dans Holocauste au Congo, il écrit à la page 261, à titre d’exemple, reprenant une citation sans jamais la remettre en question par une analyse critique : « Les Banyamulenge constituent un volcan en activité sur lequel est assis le peuple zaïrois et attendu que tout autochtone ne les accepte pas comme Zaïrois car ne s’étant jamais comportés comme Zaïrois, sauf pour les naïfs et leurs complices, il est impératif et nationaliste de leur retirer la qualité de Zaïrois qu’ils se sont appropriés ». Ça fait froid dans le dos pour toute bonne conscience. Au point que son livre a été traité de ‘‘Bible de la haine’’ par un collectif contre le racisme sur place à Kinshasa.
Quel sera l’enjeu de ce second procès en France pour contestation du génocide des Tutsis ?, interroge Ruben Morin. « Bien sûr, il précisera les limites légales des propos que l’on peut tenir sur ce crime contre l’humanité. Il pourrait également aider à mieux comprendre les raisons de la vitalité du négationnisme du génocide des Tutsis en France. Dans ce pays aux « responsabilités lourdes et accablantes » selon le rapport Duclert (des responsabilités qu’il faudra bien un jour qualifier de complicité), qui aura intérêt à venir à la barre défendre la même propagande que celle des organisateurs du génocide des Tutsis ? Ceux-là mêmes soutenus il y a 30 ans par les autorités françaises », écrit-il.
Le polémiste camerounais a, en effet, cité comme témoins de la défense, plusieurs anciens responsables politiques et militaires de l’époque, dont Hubert Védrine, ancien ministre des Affaires étrangères ; le général Christian Quesnot, chef d’état-major particulier de l’Élysée sous François Mitterrand ; le général Jean-Claude Lafourcade, commandant de l’opération Turquoise…
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