Le président rwandais Paul Kagame et la première dame Jeannette Kagame allumant la flamme du souvenir au mémorial du génocide à Kigali, capitale du Rwanda, le 7 avril 2022.CYRIL NDEGEYA/MAXPPP
La cour d’appel de Paris a annulé mercredi 21 juin l’ordonnance de non-lieu rendue en septembre 2022 dans l’enquête sur l’inaction reprochée à l’armée française lors des massacres de Bisesero, au Rwanda, en juin 1994, selon des sources proches du dossier.
La chambre de l’instruction a annulé cette ordonnance pour un motif procédural et renvoyé le dossier aux juges d’instruction du pôle crimes contre l’humanité du tribunal judiciaire de Paris.
Dans cette affaire, les associations Survie, Ibuka, la Fédération internationale des droits de l’Homme (FIDH) et six rescapés de Bisesero, parties civiles, accusent la mission militaro-humanitaire française Turquoise et la France de « complicité de génocide » pour avoir, selon eux, sciemment abandonné pendant trois jours des civils tutsis réfugiés dans les collines de Bisesero (ouest du Rwanda). Des centaines d’entre eux avaient été massacrées par les génocidaires du 27 au 30 juin 1994.
Le 1er septembre 2022, soit dix-sept ans après l’ouverture de cette information judiciaire, deux magistrats instructeurs ont refermé le dossier en signant une ordonnance de non-lieu.
Selon eux, l’instruction n’a pas établi la participation directe des forces militaires françaises à des exactions commises dans des camps de réfugiés, ni aucune complicité par aide ou assistance aux forces génocidaires ou complicité par abstention des militaires français à Bisesero.
Dossier sensible
Les parties civiles ont fait appel de ce non-lieu, contestant tout d’abord la régularité de cette ordonnance. En juin 2022, une synthèse du rapport de la commission présidée par l’historien Vincent Duclert, qui a pointé en avril 2021 « l’échec profond » de la France lors des massacres de Bisesero, avait été versée au dossier d’instruction à la demande d’un des magistrats chargés de l’affaire. Pour les parties civiles, cet acte équivalait à une relance des investigations, clôturées en juillet 2018.
Mais deux mois plus tard, l’ordonnance de non-lieu était rendue. Les parties civiles ont fait valoir lors d’une audience mi-mai que les juges auraient dû notifier un nouvel avis de clôture des investigations avant d’ordonner ce non-lieu, un avis suivi par la chambre de l’instruction.
Ce dossier sensible est emblématique de la controverse historique sur les objectifs de la mission Turquoise, déployée au Rwanda sous mandat de l’ONU pour faire cesser le génocide des Tutsis. Selon l’ONU, les massacres ont fait plus d’un million des morts entre avril et juillet 1994, essentiellement au sein de la minorité tutsi.
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